L’Exploration des Pratiques Professionnelles (EPP) se distingue de  l’Analyse des Pratiques Professionnelles classique, habituellement animée par des psychologues cliniciens ou psychosociologues.

Objectifs :

II s’agit ici d’explorer, comme un territoire, une situation-problème et d’y rechercher les différents chemins qui ouvrent autant de pistes et d’alternatives. Car nous croyons qu’il n’y a jamais Une solution à Un problème, mais plutôt un faisceau de pistes pour un problème généralement complexe. Il s’agit d’ouvrir collectivement le champ des possibles.

Contenus :

L’EPP démarre toujours par une situation concrète et réelle qu’un participant propose au groupe, parce que cette situation l’impacte directement. Cette situation singulière est urgente à traiter pour le participant. C’est de cette tension que vont naître les différentes alternatives proposées par le groupe. Si la situation n’est pas « saillante », alors il n’y a pas d’intérêt à la jouer.

L’EPP est conduite par un Comédien-intervenant. Chaque séance ou atelier est animé par un comédien-intervenant qui assure le cadre méthodologique et déontologique. Il n’a aucune place de surplomb pour construire ou analyser les situations, et permet que chacun s’exprime dans le jeu, sans jugement et en assumant collectivement l’émotionnel.

Donner du pouvoir d’agir, plutôt que des recettes. Selon la longue tradition de l’éducation populaire, notre posture n’est pas celle d’un expert qui apporte ses solutions et ses recettes – les consultants et autres coachs d’entreprise sont assez nombreux –. 

Le collectif, plutôt que l’individuel. Les nouvelles formes d’organisation du travail tendent à tout individualiser : les objectifs, les compétences, l’évaluation, le compte pénibilité et de formation, les tâches… L’EPP permet à l’inverse de redonner sens au collectif, voire de constituer des collectifs de travail solidaires et coopératifs. A chercher collectivement les alternatives à une situation-problème d’un participant, on crée souvent un groupe qui va durer au-delà de l’atelier.

Des traces dynamiques. Grâce a un relevé de conclusion collectif qui clôt chaque séance, les participants sont invités à partager ce qu’ils ont compris et appris, et à le hiérarchiser. Ils repartent ainsi chargés d’une compréhension des situations et des alternatives possibles appuyées sur leur vécu.

Méthodes pédagogiques :

L’Exploration des Pratiques Professionnelles utilise deux méthodes éprouvées de l’éducation populaire :  Le Théâtre Institutionnel et l’Entraînement Mental. Elle prend appui sur l’expérience des participants, sur leurs savoirs chauds « expérientiels », tout en faisant appel à des grilles de lecture des sciences humaines : psychologie clinique, sociologie des organisations et du travail, psychosociologie, ergonomie.

  • Le Théâtre Institutionnel[1] s’intéresse aux situations et au jeu des acteurs, dans le cadre des relations institutionnelles. Chacun jouant, volontairement ou involontairement, un rôle institutionnel dans une situation de travail, c’est donc dans cet espace que le théâtre peut apporter un éclairage à l’invisibilité des jeux institutionnels. Par le jeu théâtral, les difficultés, conflits ou les souffrances au travail sont mises sur scène, jouées par les participants eux-mêmes. Et ainsi ces situations sont abordées par une compréhension spatiale et émotivo-corporelle. La recherche collective d’alternatives permet de jouer celles-ci, de les expérimenter et de confronter les différents points de vue et leurs conséquences.
  • L’entraînement mental[2] est avant tout une philosophie de pensée. Il permet d’analyser une situation-problème et d’en trouver de multiples solutions. ll s’agit d’abord d’énoncer une situation concrète insatisfaisante. L’exploration de cette situation cherche à sortir du traditionnel « fait-solution », pour s’attarder d’abord sur l’analyse objective des faits. Un second temps consiste à appréhender les différents problèmes (sociaux, économiques, éthiques…) selon divers points de vue. Un troisième temps analyse les problèmes sous l’angle des causes, des conséquences et des contradictions, mais aussi en faisant appel aux concepts et théories. Enfin, la quatrième étape explore les pistes de solutions, dresse une  cartographie des possibles et permet de définir les priorités d’action. L’essence de cette méthode s’inscrit dans une triangulation entre la logique, la dialectique et l’éthique.

Des séances régulières

L’Exploration des Pratiques Professionnelles nécessite un engagement sur au moins 6 séances (2h30-3h), une fois par mois (ou un mois et demi).

La régularité est ainsi un engagement contractuel de chacun, institution demandeuse, participants de l’institution, comédien-intervenant. Le cadre ainsi définit permet que chacun s’inscrive dans un moyen terme constructif.

Ainsi, il est plus facile de travailler les questions en profondeur, de constituer des groupes coopérant et de s’approprier une manière d’explorer le réel plus durable.

Publics concernés :

  • Nombre : 10-15 personnes
  • Groupe de pairs (pas de supérieur hiérarchique, sauf éventuellement à la dernière séance),
  • Tous les participants sont volontaires et non contraints.
  • Confidentialité totale : ce qui est produit par le groupe reste dans le groupe. Néanmoins, possibilité de jouer une ou plusieurs situations à la fin de la période dans le cadre d’une présentation au sein de l’entreprise (avec accord du groupe).

Conditions matérielles 

  • Une salle isolée (bruit possible) suffisamment grande pour pratiquer le théâtre à 10 ou 15 et agréable
  • Chaises et tables pour écrire
  • Paper board et feutres

 


[1]« Le théâtre forum » et « Jouer le conflit », Yves Guerre, éditions l’Harmattan, 2007.

[2]« La culture doit partir de la vie pour retourner à la vie » Joffre Dumazedier, Cahiers de la culture populaire Paris, Peuple et Culture, 1945.